Comment sont les nouvelles, Hocine ?
Tout va pour le mieux, el Hamdoulilah. Avec l’USMBA, nous sommes toujours premiers au classement et l’accession est plus proche que jamais.
Pourquoi Achiou a opté pour la Ligue 2 cette saison ?
Ben, c’est simple, ce n’est pas à moi d’appeler les présidents de club pour leur demander de me prendre. Je vois que désormais, c’est surtout les joueurs qui parlent constamment dans les journaux qui sont pris par les grands clubs. Vous me connaissez, je suis un joueur de terrain, pas des médias.
Votre passé, notamment d’ancien international et vos qualités n’ont pas vraiment besoin d’un coup de pouce des médias, non ?
El Hamdoulilah. Je pense que certains présidents ont peur de moi, de ma personnalité, quoi ! J’ai ma dignité et ce sont les présidents qui viennent vers moi, pas l’inverse. Le football algérien, à présent, ne répond à aucune logique. C’est devenu un business plus qu’autre chose.
On dit que vous êtes arrogant et que vous prenez les gens de haut et cela a tendance à faire fuir les présidents de club aussi…
(L’air étonné…) Je ne sais pas pourquoi on dit ça ! J’ai de bonnes relations avec les gens du milieu. Je suis quelqu’un de simple, un fils du peuple. Les gens doivent me connaître, avant de me juger. J’ai été contacté par des présidents de deuxième division et j’ai répondu à leurs sollicitations sans souci. Je ne prends personne de haut.
Et vous avez toujours le niveau en Ligue 2 ?
Mon niveau est supérieur à la Ligue 1 carrément, mais Allah ghaleb, j’aime jouer où je me sens le mieux.
Des regrets de ne pas finir votre carrière à l’USMA ?
Quand je suis revenu à l’USMA la dernière fois, je ne vous cache pas que j’avais pour objectif de finir ma carrière au club, mais malheureusement, ça n’a pas marché. Vous connaissez l’histoire, ce n’est pas la peine d’y revenir. On s’est débarrassés de moi assez facilement et on a choisi de se mettre du côté d’un coach étranger. La nouvelle direction à l’époque ne savait pas ce qu’a donné Achiou à l’USMA.
Ça vous fait mal jusqu’à aujourd’hui ?
Non ! Vous savez, j’ai avancé et je ne suis pas quelqu’un qui regarde trop en arrière. Après le départ du coach en question, j’ai attendu un geste de la direction, mais rien. Ali Haddad me disait : «Toi, t’es un enfant de l’USMA et tu resteras à vie dans ce club, même lorsque tu arrêteras le foot, c’est une promesse.» Malheureusement, Haddad ne s’est pas conduit en homme avec moi et n’a pas tenu sa promesse. Je m’attendais à sortir par la grande porte, mais certainement pas de cette manière. J’aurais aimé qu’on me dise les choses en face. Je suis quand même parti la tête haute et je sais que ce que j’ai donné pour l’USMA, personne ne pourra me l’enlever.
Si on comprend bien, Ali Haddad vous a trahi…
Il s’est trahi lui-même, puisqu’il n’a pas tenu sa parole. Il a écouté ce que lui disaient des perturbateurs du club. Je sais qu’on lui a dit que certains joueurs voulaient faire descendre l’USMA en Ligue 2 pour leur intérêt. Vous savez, je le dis tout haut, la réussite actuelle de Haddad avec l’USMA, c’est grâce à moi.
Comment ça ?
Si l’USMA était descendue en Ligue 2 cette année-là (Ndlr, la première année de Haddad à la tête du club), le club aurait eu du mal à remonter et Haddad ne serait certainement pas resté. Je me souviens lors de la phase retour, j’ai réalisé d’excellents matchs, avec plusieurs buts et passes décisives à la clé. C’est moi et les autres joueurs aussi qui avons été les acteurs principaux du maintien du club. Les jeunes jouaient avec la peur au ventre. Avec du recul, je confirme que cette année-là, on s’est un peu moqué de nous. On nous a menti et au final, ils avaient tout programmé pour nous virer, presque tous. Je parle surtout des anciens.
Vous ne pouvez pas dire ça, puisque les Zeghdoud, Dziri et Meftah sont toujours au club…
Chacun sa personnalité. Déjà pour Dziri, ces mêmes perturbateurs lui ont mis des bâtons dans les roues.
Et même certains dirigeants sont restés au club, malgré le départ de Allik…
Qui ça ? Aïssaoui ? Le dirigeant le plus nul qu’a jamais connu le football ! C’est quelqu’un qui n’aime pas les joueurs et qui est jaloux d’eux. Je me rappelle de certaines personnes qui avaient peur de répondre à Haddad. De véritables béni oui-oui.
Vous en pensez quoi du niveau actuel de la L1 ?
De plus en plus médiocre ! Croyez-moi, je peux jouer avec un seul pied en Ligue 1 si je le voulais vraiment. J’arrive à mes 35 ans et je continue à faire des tests physiques et qui sont toujours au top. Contrairement à certains, moi, j’ai beaucoup travaillé quand j’étais très jeune.
Le fait qu’il y ait beaucoup d’argent dans le foot a fini par tuer ce sport-roi, non ?
Où est cet argent ? Vous vous trompez, il n’y a pas du tout d’argent dans le football algérien. Les footballeurs algériens sont les plus pauvres du Maghreb. Un appartement coûte à présent plus de trois milliards de centimes, alors qu’un joueur n’arrive même pas à en toucher deux. Il ne peut, du coup, même pas se payer un appart digne de ce nom. Regardez nos voisins, les Marocains, les Tunisiens et même les Egyptiens, ils sont dans des villas et mènent la belle vie. Un joueur, pour qu’il soit performant à 100% sur le terrain, doit être à l’aise et ne doit pas avoir de problèmes. Par le passé, les joueurs, quand ils signaient leur contrat, avaient un appart et de l’argent. Plus maintenant.
Un joueur qui touche presque 300 millions de centimes par mois, on ne peut pas dire qu’il ne gagne pas sa vie… et le simple citoyen dans tout ça ?
Oui, je suis d’accord. Après, il y a des joueurs qui perçoivent des salaires de 300 millions par mois, mais si j’étais le président, je ne lui donnerai pas plus de 30 millions, vu le niveau. Il faut avoir un certain statut pour gagner cet argent. Etre international et avoir des stats qui parlent pour toi. Le football algérien n’est plus géré par ceux du métier. Les faux agents, les faux dirigeants et autres ont gangrené ce sport.
Revenons à vous. Pourquoi n’avoir pas prolongé votre aventure avec la JSK, sachant que c’est grâce à ce club que vous avez retrouvé votre niveau et l’EN ?
C’est une question de destin. Je ne voudrais surtout pas entrer en conflit avec Hannachi, car lui aussi n’a pas tenu sa promesse et moi, je suis un homme qui a des principes. N’oubliez pas qu’après mon départ de l’USMA, je suis resté par la suite six mois sans compétition, alors que le MCA me voulait à tout prix. Permettez-moi d’ajouter quelque chose.
Oui, allez-y…
Malgré tout ce qui s’est passé avec Hannachi à cette époque, j’ai quand même gardé de bons souvenirs de mon passage à la JSK. N’oubliez pas que je suis un Kabyle et c’est un honneur pour moi d’avoir évolué au sein de la JSK, même si cela a été court. C’était un rêve pour moi de jouer à Tizi Ouzou et d’avoir côtoyé un public aussi connaisseur que celui de la JSK. A présent, j’ai de bons rapports avec Hannachi, puisque nous avons décidé d’enterrer la hache de guerre.
Parlons à présent des scènes de violence dont a été victime votre club, l’USMBA, cette saison. A Annaba, face à l’ASMO et dernièrement à Hadjout. Vous avez été personnellement visé. On dit que c’est vous qui avez provoqué les supporters. Vous répondez quoi ?
Non, pas du tout. Je n’ai jamais insulté ou fait de geste obscène envers les supporters de ma carrière. Face à l’ASMO, j’ai été visé, oui, et on m’a agressé. J’ai déposé plainte contre mon agresseur et l’affaire suit son cours au tribunal. A Hadjout, c’était un véritable traquenard auquel on a eu droit. Les supporters ont envahi la pelouse pour nous tabasser. Ils étaient munis de toutes sortes d’armes blanches, de fumigènes, de barres de fer. On a vraiment eu peur pour notre vie.
A se baser sur les images vidéo, ce sont les joueurs qui ont lancé les hostilités…
Pas du tout ! Les intimidations ont débuté dès notre entrée au stade. On nous a copieusement insultés Belkaïd et moi, avant même le début du match. Par la suite, les supporters commençaient à entrer sur la pelouse petit à petit et personne ne s’y est opposé. On était vraiment dans l’insécurité et je rajouterai une chose.
Allez-y…
Lors de ce match à Hadjout, j’ai vu des scènes incroyables que je n’ai jamais vues durant toute ma carrière. L’arbitre a failli être lynché par les joueurs de Hadjout qui lui ont fait sortir son maillot de son short et presque frappé. Le pauvre, il a eu peur et tremblait. Moi, j’étais littéralement choqué. C’est malheureux d’en arriver là pour un simple match de football. Je me souviens qu’au match aller, le match s’est terminé (1-1) alors qu’on pouvait les battre par 5 buts, mais personne ne les a touchés.
Pourquoi vous êtes souvent la cible des supporters lors des matchs à l’extérieur ?
Je ne sais pas. Peut-être que c’est parce que je suis l’un des leaders de mon équipe. Heureusement que ce n’est pas toujours comme ça dans tous les stades. La violence n’a rien à voir dans le football.
Comment doit-on faire, selon vous, pour éradiquer ce phénomène qui ne cesse de prendre de l’ampleur ?
Il faut prendre des sanctions exemplaires, quitte à reléguer des clubs. Les joueurs ne sont plus en sécurité et cela ne peut plus continuer ainsi. Les dirigeants de club doivent prendre leurs responsabilités et encadrer leurs supporters. A ce rythme, il y aura des morts sur les terrains. Doit-on en arriver là pour que nos responsables réagissent ?
D’après-vous, quelle est la différence entre les Ligues 1 et 2 ?
En Ligue 2, il y a beaucoup d’engagement et moins de technique. En Ligue 1, les stades sont plus commodes, l’arbitrage est meilleur et il y a moins de duels physiques.
On revient à l’USMA qui va être sacrée championne très prochainement, un mot ?
Pour donner mon avis, il faut d’abord que je regarde les matchs. Je n’ai pas eu trop l’occasion de voir l’USMA cette saison, donc je ne peux pas me prononcer. Quoi que sur le papier, ils ont les meilleurs joueurs et ce n’est pas vraiment une surprise que le club soit sacré champion. On m’a dit que cette saison, l’USMA gagnait surtout ses matchs, mais sans pour autant montrer un visage séduisant. Je suis content en tout cas, car j’aime toujours ce club.
Généralement, les matchs de Ligue 2 se jouent les vendredis. Pourquoi ne vous a-t-on jamais vu à Bologhine cette saison pour suivre un match de l’USMA ?
Tout simplement par ce que je ne suis pas le bienvenu à Bologhine. Aussi, les samedis, c’est souvent mon jour de repos et je préfère le consacrer à ma famille.
Ces jours-ci, vous soufflerez votre 35e bougie ; pensez-vous à la retraite ?
Tant que j’ai toujours cette envie de jouer, je resterai sur les terrains. C’est une perte si j’arrête. Je veux battre un record de longévité. Jouer un maximum de matchs, avant de raccrocher. Je suis un joueur qui veut battre des records.
Continuer à jouer jusqu’à quand ?
Au maximum ! Je veux apporter mes connaissances aux jeunes. Ne vous inquiétez pas, je suis encore au four et au moulin.
Parlons un peu de la sélection nationale à présent. D’après-vous, quelles sont ses chances lors de la prochaine Coupe du monde ?
Sur un match, tout reste possible. Il ne faut pas partir au Brésil battus d’avance. On doit jouer nos chances à fond et on verra ce que ça donnera au final. Je pense que l’équipe actuelle a beaucoup d’atouts qu’on doit exploiter. Jusqu’à présent, je n’ai rien vu de cette sélection. Je n’ai pas été emballé, quoi !
Qu’en pensez-vous du travail de Vahid Halilhodzic ?
Je ne le connais pas trop, puisque je n’ai pas eu à travailler sous ses ordres. De ce fait, je ne peux pas avoir un jugement précis. Cela dit et vu les qualités intrinsèques de nos joueurs, je trouve que l’EN n’a pas encore atteint le top de son niveau.
Vous qui avez côtoyé, un temps, la sélection de 2009, quelle est la différence entre les deux générations ?
En 2009, il y avait une symbiose entre les joueurs et ça se reflétait sur le terrain. Même si on défendait plus, on réalisait de grands matchs et on sentait la solidarité des joueurs. Pour le moment, je n’ai pas encore vu tout ça chez la sélection actuelle.
Les stages consacrés exclusivement aux locaux qu’organise le staff technique actuellement, qu’en pensez-vous ?
C’est du m’importe quoi. L’autre jour, j’ai su qu’il y avait 13 membre du staff technique pour uniquement quatre joueurs. C’est incroyable. Il faut qu’on arrête de mentir aux gens et même aux joueurs. Ce n’est pas la peine de jouer avec eux. Celui qui mérite d’aller au Mondial y va, celui qui ne le mérite pas, il reste chez lui. Pas la peine de faire des détours.
Après la Slovénie, l’EN affrontera lors de sa préparation au Mondial, l’Arménie et la Roumanie. Votre avis sur le choix de ces adversaires ?
Ce n’est pas sérieux. On aurait dû élever le niveau en affrontant de grosses nations de football. L’equipe de 1982 et celle de 1986 avaient affronté de grandes équipes. Même nous en 2007, on avait joué face à des équipes comme l’Argentine ou même le Brésil. Il faut évoluer.
Une dernière question. Regrettez-vous de n’avoir pas eu une expérience professionnelle digne de ce nom ?
Je ne suis pas parti au bon moment, tout simplement. A mon époque aussi, il n’y avait pas une telle médiatisation autour de la sélection. Le joueur algérien était méprisé. J’ai passé des tests concluants avec plusieurs clubs, mais ce qu’on me proposait financièrement n’était pas du tout digne d’un joueur international. J’ai ma fierté, quand même !
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