Marc Wilmots, qui a été le meilleur joueur de l'année 2014 ?
Initialement, j'avais voté pour Arjen Robben, Manuel Neuer et Thibaut Courtois. Donc pour moi, c'est Neuer. C'est un gardien complet qui est, selon moi, le meilleur au monde. Il a fait une saison parfaite, il a presque tout gagné, il est constant tout en faisant beaucoup de progrès. C'est le premier relanceur de son équipe et c'est vraiment le gardien moderne par excellence. Outre le Bayern, il a mené l'Allemagne au titre mondial. Donc j'estime que sur l'année écoulée, on peut récompenser celui qui arrête les buts et pas toujours ceux qui les marquent.
En tant qu'ancien joueur offensif, n'êtes vous pas plus sensible à ce que font Lionel Messi et Cristiano Ronaldo ?
Si, bien sûr. Cristiano Ronaldo est un des plus grands professionnels de la planète, qui met 40 buts par saison. Le problème, c'est que ça devient presque une habitude. Messi a connu une année plus compliquée avec des blessures, même s'il est allé en finale de la Coupe du Monde. Mais bon, on parle de quoi là ? Ce sont deux joueurs monstrueux, qui font dans la continuité, qui gagnent des titres et qui sont encore jeunes. On a l'impression qu'ils sont sur une autre planète depuis quelques années. Ceci étant dit, Manuel Neuer a lui aussi un beau bilan en terme de statistiques.
Quand vous étiez joueur, qui vous impressionnait le plus ?
C'était Ronaldo le Brésilien. Il Fenomeno, c'était la même chose que Cristiano Ronaldo et Messi. C'était une machine à marquer qui alliait technique, vitesse et qui avait une constance dans ses prestations. Dommage qu'il ait été rattrapé par les blessures avec son tendon rotulien qui a commencé à chauffer. Ce qui m'impressionne aussi avec Cristiano Ronaldo et Messi, c'est qu'ils ne sont jamais blessés. Mais ça n'est pas un hasard, il y a beaucoup de travail derrière. C'est une question de prendre soin de son corps, d'être professionnel à 200% et de vivre pour son métier. Le tout avec des qualités physiques, mentales et un talent au dessus de la norme. Ça donne des joueurs qui marqueront l'histoire du foot.
Eden Hazard a déclaré qu'il voulait atteindre ce niveau. Qu'en pensez-vous ?
Eden est sur une excellente progression pour l'instant, et j'espère bien qu'il ambitionne d'atteindre ce niveau. Il doit juste être plus efficace et plus finisseur. Il a montré avec Lille qu'il pouvait marquer une vingtaine de buts par saison. C'est sur ce critère là qu'il doit progresser pour aider son équipe dans les moments-clés. Mais c'est aussi un collectif qui permet ça. Eden est encore jeune, il a 23 ans et il a beaucoup d'ambition, c'est bien. C'est tout ce que je lui souhaite.
Parlons à présent de vos confrères. Qui, de Carlo Ancelotti (Real Madrid), Diego Simeone (Atlético de Madrid) et Joachim Löw (Allemagne) est à vos yeux le meilleur entraîneur de l'année 2014 ?
Moi j'aime beaucoup Diego Simeone. Quand on voit l'effectif qu'il a, on voit qu'il tire le maximum de son potentiel. Il a une équipe bien en place, difficile à bouger avec une assise défensive très stable. Il a aussi toujours le nez pour aller chercher l'attaquant qui faut, comme Falcao ou Diego Costa, pour faire la décision. Simeone a réussi là où on ne l'attendait pas, c'est à dire aller en finale de la Ligue des champions et gagner le titre de champion d'Espagne en laissant le Real Madrid et Barcelone derrière, il ne faut pas l'oublier… Il a vraiment fait une année extraordinaire. Ça fait trois ans, il y a de la continuité chez lui.
Pour le plus beau but, avez-vous une préférence entre les trois finalistes pour le Prix Puskas de la FIFA ?
Je dirais celui de James Rodriguez. Le garçon est dos au but, et ce qui m'épate c'est cet instinct qu'il a de se mettre face au jeu quand il reçoit le ballon avec son contrôle orienté de la poitrine, enchaîné avec une reprise de volée formidable. Le tout pendant une Coupe du Monde ! Ce qu'il fait est inarrêtable. Dans la réalisation, dans l'idée, dans le contrôle : tout est parfait. Ce qui fait la différence, c'est qu'il avait tout lu, tout analysé et a pris sa décision de faire ça avant de recevoir le ballon. Du coup, ça va plus vite. Cette façon de penser plus vite que les autres, c'est toute la beauté du foot et c'est la marque d'un grand joueur.
Quelle est votre plus grande satisfaction de cette année 2014 ?
C'est notre état d'esprit pendant la Coupe du Monde. Ça n'est jamais facile de partir à 50-55 personnes. Toute la préparation a été très bien faite et tous nos choix ont été judicieux. Nous n'avons connu aucun problème avec les membres de mon staff. Nous avons vraiment formé un groupe qui était là pour représenter la Belgique. Les égos étaient de côté et seul le collectif importait. Nous avons enchaîné quatre victoires en quatre matches, ce qui n'était jamais arrivé pour la Belgique. Nous sommes tombés en quart de finale contre l'Argentine sans être balayés, et même avec des regrets car nous aurions pu aller plus loin. C'était une remise sur la carte du football belge, le tout avec l'équipe la plus jeune du tournoi. Je pense que mes garçons ont pris beaucoup d'expérience. C'était aussi une confirmation de nos matches de qualifications, deux années pleines au bout desquelles nous sommes quatrièmes au classement mondial alors que nous partions de la 55ème place. Nous avons remis notre équipe nationale en place, et surtout nous avons retrouvé notre public.
La vie de sélectionneur est très intense pendant une Coupe du Monde. Avez-vous eu un coup de blues quand tout s'est arrêté ?
Non, pas tellement. Je faisais déjà ma cinquième Coupe du Monde, dont quatre en tant que joueur. J'ai aussi été consultant, donc j'ai vu tout ça de l'intérieur et de l'extérieur. J'ai appris à faire la part des choses. Il y a des choses qui sont plus importantes que le football et on peut se ressourcer avec sa famille. En fait, pour un joueur ou pour un entraîneur, le plus difficile c'est de réenchaîner derrière avec des nouveaux objectifs quand on a atteint presque le maximum. Quand je suis rentré du Brésil, je suis allé directement à Bordeaux pour trouver un camp de base pour l'Euro 2016 pour avancer et continuer à voir plus loin. La vie ne s'arrête pas là, on a encore faim et on continue à régler tous les détails pour être performants.
Le plus dur est-il à présent de confirmer ?
On doit toujours confirmer ! Ça dépend de quelques facteurs, il y a la méforme, les blessures… On n'a pas un noyau à 70-80 joueurs, mais plutôt autour de 30-35. Nous avons de bons éléments de la sélection Espoirs que nous essayons d'intégrer dans l'équipe A. En tous cas, il faut s'arracher pour se qualifier. Cela fait plus de 30 ans que nous ne nous sommes pas qualifiés pour un Euro et qu'on n'a pas enchaîné deux tournois consécutifs. Donc je sais que ça sera difficile. Après, pendant un tournoi, c'est une question de moment. Ça peut basculer sur rien. L'Allemagne aurait pu être éliminée contre l'Algérie, qui a eu trois occasions et ne les a pas mises. Moi, je veux nous qualifier pour l'Euro, ça serait déjà quelque chose d'unique. Mais nous aurons l'ambition d'y faire mieux. Après un quart de finale de Coupe du Monde, atteindre une demi-finale de l'Euro serait exceptionnel.
Avoir autant de talents à votre disposition doit rendre la vie d'un sélectionneur facile. Mais cela ne la rend-elle pas parfois plus compliquée ?
On oublie une chose : regardez le noyau de l'Allemagne, l'Espagne, l'Italie ou la France. Ils n'ont rien à nous envier. Il y a beaucoup d'autres équipes qui ont du talent. Ça se joue à la volonté et, comme je dis toujours "à la douleur du mal". Il faut s'arracher jusqu'à la limite, et c'est ce que mes joueurs ont réussi à faire, malgré leur talent... Le travail et le collectif, ce sont aussi des grandes qualités. Moi, avec 11 talents, je n'y arrive pas. Mais avec un bon collectif, je vais y arriver. Surtout avec un banc qui pense comme ça. Donc si on a un groupe qui continue à penser comme ça, on va avoir des résultats. Mais si on ne pense qu'à soi même et à son talent... Le talent ne suffit pas. Il y a le travail et le professionnalisme qui doivent venir avec. Il faut bien connaître tous les détails de son métier. Et puis il y a l'expérience qui demande du temps. Cette génération en a pour sept-huit ans.
Comment voyez-vous l'évolution du jeu des Diables Rouges ?
Nous sommes repartis à la base pour avoir une assise défensive solide. Nous avons pris très peu de buts. Du coup, le regard des adversaires à changé. Ils nous attendent et essaient de nous prendre en contre-attaque. La philosophie a changé. La Belgique prend le jeu en main, elle est ambitieuse, elle avance sur l'adversaire.
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