Nostalgie

Figueroa, personne ne passe dans sa surface

"Figueroa est le meilleur joueur de l'histoire du football chilien et probablement le meilleur défenseur central de l'histoire en Amérique", a dit un jour Pelé.

Auteur : lundi 14 novembre 2016 19:46

Pour préparer la Coupe du Monde de la FIFA, Chili 1962™, le Brésil affronte en amical les juniors de Santiago Wanderers, club de la ville de Valparaiso, à 10 kilomètres de Viña del Mar, où les champions du monde en titre feront leur entrée dans le tournoi contre le Mexique. À cette occasion, un adolescent de 15 ans impressionne Pelé et compagnie.

Douze ans plus tard à la Coupe du Monde de la FIFA, Allemagne 1974™, le joueur en question a déjà remporté des trophées. "La surface, c'est comme ma maison. J'y laisse entrer qui je veux", explique-t-il alors. Elías Figueroa a alors 27 ans et tout le monde comprend sa déclaration. Grâce à son sens de l'anticipation, à son jeu aérien, à sa relance et à son sens du commandement, l'international chilien s'est imposé comme l'un des plus grands défenseurs centraux. À tel point que lors de l'édition 1974 de la grand-messe du football mondial, il complète la défense centrale du onze-type de la compétition avec un certain Franz Beckenbauer…

"Figueroa est le meilleur joueur de l'histoire du football chilien et probablement le meilleur défenseur central de l'histoire en Amérique", a dit un jour Pelé. Ce qui est certain, c'est qu'il a révolutionné à lui seul le football de son pays, recueillant les éloges et le brassard de capitaine partout où il est passé, en sélection comme en club.

Les obstacles comme motivation
Né à Valparaiso le 25 octobre 1946, Figueroa vit une enfance heureuse, même si la santé lui joue quelques tours. De deux à sept ans, il a des problèmes d'asthme récurrent, qui l'empêchent d'avoir une activité physique régulière. À 11 ans, on découvre chez lui un début de poliomyélite. Il doit quasiment réapprendre à marcher. "Tout cela m'a rendu plus fort. Je me fixais des objectifs à court terme. Cela m'a forgé le caractère et appris à relever les défis", explique-t-il.

À 14 ans, il évolue au Club Deportivo Liceo. C'est un milieu de terrain habile et intelligent, qui attire l'attention de Santiago Wanderers. Il fait un essai concluant, descend d'un cran en position d'arrière central, mais ne réussit pas à s'imposer comme titulaire. La route est barrée par l'international chilien Raúl Sánchez, mondialiste en 1962. Plutôt que de cirer le banc, il préfère aller voir ailleurs et prend la direction de l'Unión La Calera.

Il débute en première division chilienne en avril 1964. Peu de temps après, il réalise un match époustouflant contre Colo Colo. "Nous avons devant nous un garçon de 17 ans qui a l'assurance d'un vieux briscard. On a envie de l'appeler Don Elías Figueroa", s'exclame en direct un commentateur radio.

La Muraille rouge
Figueroa revient chez les Wanderers en 1965. La même année, il fait ses grands débuts en équipe nationale. Il gagne vite sa place dans le groupe chilien qui traversera l'Atlantique pour disputer la Coupe du Monde de la FIFA, Angleterre 1966™. À 19 ans, il contribue à faire de son équipe la meilleure formation à ne pas sortir de la phase de groupes. La défense chilienne est d'ailleurs surnommée la Muraille rouge.

Au retour d'Angleterre, plusieurs clubs expriment un vif intérêt pour le jeune défenseur. C'est Peñarol qui remporte la mise. Figueroa gagne ainsi le droit d'évoluer aux côtés de joueurs très confirmés comme Ladislao Mazurkiewicz, Néstor Gonçalves, Alberto Spencer et Pedro Rocha. Avec les Carboneros, il remporte deux championnats d'Uruguay, en 1967 et 1968, puis une Supercoupe des champions intercontinentaux en 1969 contre le Santos de Pelé. En finale, Figueroa est intraitable.

À l'époque, les matches de football étaient des combats d'hommes. "Contre le Racing de Avellaneda, je repousse un centre d'une tête plongeante et Alfio Basile me donne un coup de pied en pleine tête. J'ai repris conscience dans les douches. Aussitôt, j'ai demandé comment ils s'en étaient sortis. Mes coéquipiers m'ont dit que NOUS nous en étions parfaitement sortis, car j'avais joué jusqu'à la fin du match", aime à raconter Figueroa.

À Moscou comme un lion
Fin 1971, Míster Lujo est sollicité par le Real Madrid, mais il préfère rejoindre l'Internacional de Porto Alegre. Le championnat du Brésil réunit alors la crème du football sud-américain. C'est ce qui intéresse Figueroa. En 1973, Figueroa est le fer de lance du Chili qui décroche la qualification pour la Coupe du Monde de la FIFA, Allemagne 1974™. Après avoir éliminé le Pérou, la Roja doit jouer un barrage contre l'Union Soviétique, médaillée de bronze au Tournoi Olympique Masculin de Football de Munich en 1972. Don Elías réalise une partie d'anthologie à Moscou, avec à la clé un match nul 0:0. "Au match aller, il était comme un lion. Il sautait en même temps que deux Russes, tout le monde retombait par terre et à la fin du cafouillage, c'est toujours lui qui ressortait avec le ballon", se souviendra plus tard le gardien chilien à cette occasion, Juan Olivares. 

L'URSS refusera de se rendre au Chili en raison du coup d'état qui venait de secouer le pays, par conséquent la Roja se qualifiera pour l'Allemagne sur tapis vert. Lors de la Coupe du Monde de la FIFA 1974™, le défenseur chilien est impérial. Le Chili est une nouvelle fois éliminé au premier tour, mais Don Elías rentre chez lui avec les honneurs et un complément de Beckenbauer : "Je suis le Figueroa d'Europe", avait dit le Kaiser de lui-même.

En 1974, le Figueroa d'Amérique reçoit justement le prix  de meilleur joueur d'Amérique, récompense qu'il s'adjugera les deux années suivantes. En 1975, il remporte le championnat du Brésil comme capitaine de l'Internacional. Il se charge lui-même d'inscrire le but du sacre, de la tête, lors de la finale contre Cruzeiro. L'histoire retiendra également que lors de cette journée nuageuse, les rayons du soleil n'ont percé qu'une seule fois : pour éclairer Figueroa au moment de sa tête victorieuse.

Retour et adieu
Le Gol Iluminado consolide encore la réputation de Figueroa au Brésil. Il atteint un statut d'idole en 1976 lorsqu'il conduit l'Internacional à un deuxième titre de champion national consécutif. Figueroa estime toutefois que l'heure est venue de rentrer au pays. "Si vous me demandez à qui je peux comparer Don Elías, je ne saurais pas vous répondre", résumait l'entraîneur de l'Inter à l'époque, Rubens Minelli.

À son retour au Chili, le désormais mythique défenseur central décide de s'engager avec le modeste club de Palestino. Chez les Árabes, il continue de faire des miracles puisque le club remporte successivement une Coupe du Chili (1977), suivie d'un championnat national (1978) au cours duquel Palestino établira un record chilien qui tient toujours : une série de 40 matches sans défaite. En 1981, Figueroa rejoint les États-Unis, où il porte les couleurs de Fort Lauderdale Strikers, où évoluent également Gerd Müller et Teófilo Cubillas.

Un an plus tard, il rentre au bercail pour de bon, signe à Colo Colo et s'offre une troisième participation à la Coupe du Monde de la FIFA™. Il est le seul joueur chilien de l'histoire à avoir participé trois fois à l'épreuve mondiale. Après Espagne 1982, il dispute encore quelques matches avec Colo Colo, avant de raccrocher définitivement le 1er janvier 1983, juste après un derby contre l'Universidad de Chile (2:2). Le football perdait un grand défenseur, mais les surfaces se remplissaient à nouveau d'attaquants.

                                                             IN.FIFA.com

Publié dans : chili Figueroa

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