Auteur :
Saïd Fellak
mardi 26 janvier 2016 21:45
Dans cette seconde partie de l’interview que nous a accordée Riyad Mahrez, après la cérémonie du Ballon d’Or organisée dimanche soir, le joueur est revenu avec nous sur sa belle saison avec Leicester, ses contacts avec les gros clubs qui le convoitent, mais aussi la sélection nationale. Pour la toute première fois, l’ancien Havrais a exprimé dans les médias sa frustration par rapport à ce qu’il a vécu lors de la dernière Coupe du monde disputée au Brésil.
Leader de la Premier League avec Leicester, lauréat du Ballon d’Or algérien, convoité par de grands clubs européens, peut-on dire que Riyad Mahrez est aujourd’hui un homme comblé ?
C’est clair que ce qui m’arrive cette saison est tout juste exceptionnel. Maintenant, comme je le dis toujours, il faut que je reste lucide et que je ne m’enflamme pas. J’ai appris que dans le foot, tout va très vite. Je dois rester concentré et très sérieux car la saison est encore très longue.
Justement, est-ce que vous appréhendez un peu cette période de moins bien qui pourrait arriver prochainement ?
Je suis déjà dedans. Ça fait quatre matchs que je n’ai pas marqué et que j’ai pas été forcément très bon. Samedi dernier face à Aston Villa, j’ai repris un peu le dessus et j’ai fait un bon match. On sait dans la saison qu’on va avoir de bons et de mauvais moments. Il faut juste garder la confiance et essayer de vite se ressaisir quand on est dans une moins bonne période.
Peut-on expliquer cette période par un coup de pompe physique vu que vous avez disputé beaucoup de matchs dernièrement ?
Oui, c’est peut-être un peu de la fatigue. Toutefois, il faut savoir que, depuis quelques semaines, les défenseurs me serrent plus. Ça devient plus difficile. Je suis très surveillé. Si je dois être plus performant, je dois passer un autre pallier.
Vous sentez réellement que vous êtes plus surveillé qu’avant ?
Oui. On n’hésite pas à être plus agressif pour me stopper.
Quelques jours nous séparent de la clôture du marché des transferts hivernal. Vous allez sans doute rester à Leicester jusqu’à la fin de la saison, mais si on vous demandait de me donner des noms de clubs qui vous ont sollicité, peut-on les connaître ?
Ce que je peux dire, c’est qu’il y a eu beaucoup d’approches. Après, c’est normal, quand on marque des buts et lorsqu’on est autant performant, de gros clubs s’intéressent à vous. De mon côté, je suis toujours resté humble, et je ne veux surtout pas me prendre la tête avec tout ça. Ce qui est sûr, c’est que je resterai à Leicester jusqu’à la fin de la saison au moins, après on verra bien.
Beaucoup de grands clubs s’intéressent à vous. Avez-vous une préférence ?
Tous les grands clubs sont intéressants.
On connaît votre penchant pour le Barça. Le rêve le plus fou ?
J’aime le jeu du Barça, mais je ne veux pas trop parler de ça maintenant. Tout ce que je peux dire pourrait être mal interprété. Ça va commencer à spéculer et je n’ai pas envie d’entrer dans des histoires de ce genre, surtout que je suis encore sous contrat avec Leicester City. Je veux tout d’abord aider mon club à réaliser des choses magiques cette saison.
Il y a deux mois, lors d’une interview que vous nous aviez accordée, vous disiez que l’objectif de Leicester City était d’assurer le maintien. Celui-ci désormais atteint, peut-on voir votre club aller chercher le titre de champion, sachant qu’il occupe actuellement la tête du classement, après 23 journées ?
Non, ça va être difficile à mon avis. Cette année, le championnat est bizarre. On se retrouve à la première place devant les ténors de la Premier League. Après, c’est clair, on commence à penser au titre, mais on sait que dans le football de haut niveau, ça va vite. Si on veut gagner le championnat ou viser une participation en Ligue des champions la saison prochaine, il faudra gagner un maximum de matchs d’ici à la fin de la saison. A nous de faire le job.
Toute cette ascension vous a-t-elle fait perdre un peu la tête. Riyad a-t-il changé ?
Non, rien n’a changé en moi. Je reste toujours quelqu’un de simple. Comme d’habitude, avec les mêmes personnes à mes côtés.
Récemment, vous avez raté deux penalties de suite avec votre club. Ranieri, votre coach, a dit qu’il s’était entretenu avec vous et qu’il a été décidé que vous ne tireriez plus de penalty prochainement. Cela vous a-t-il affecté ?
Non, ça ne m’a pas affecté, car je sais que le coach a une grande confiance en moi. Il me donne déjà beaucoup de responsabilités sur le terrain. Il a surtout voulu me protéger et m’éloigner de la pression. Je ne vais pas me prendre la tête à cause des penalties ratés. N’oubliez pas que j’en ai déjà transformé quatre cette saison. Maintenant, je vais essayer d’abord de marquer dans le jeu et après, je vais retirer de nouveau les penalties.
Pourquoi, selon vous, vous avez raté deux penalties de suite ?
Le premier, face Bournemouth, c’est surtout le gardien qui fait un bel arrêt. Le second, face à Aston Villa, je voulais mettre le ballon au milieu, mais je n’ai pas bien tiré. Là, c’est ma faute.
Est-ce que vous êtes du genre à lire les médias le lendemain des matchs et voir ce qu’ils ont écrit ou parlé de vous ?
Non, pas trop. Généralement, on m’envoie quelques articles qui parlent de moi, sans plus. Je ne suis pas quelqu’un qui fait très attention à ce qu’on écrit sur lui.
Parlons à présent de la sélection nationale. Est-ce que vous sentez que depuis l’arrivée de Christian Gourcuff, vous êtes devenu plus important au sein de cette EN ?
C’est sûr que j’ai plus de responsabilités. Le coach me fait confiance aussi. Je fais de bonnes prestations avec la sélection et les statistiques le prouvent. Après, mon comportement et mon attitude n’ont pas changé plus que ça.
Revenons au tout début. Votre convocation pour la Coupe du monde 2014 a surpris pas mal de gens. A cette période, on ne vous connaissait pas trop. Après une première titularisation face à la Belgique lors du 1er match, on ne vous a plus revu après dans le tournoi…
Oui, c’est vrai. J’aurais aimé jouer cette Coupe du monde de manière différente. C’est vrai que le coach de l’époque (Vahid Halilhodzic) m’avait retenu pour ce tournoi alors que j’évoluais en Championship. Cependant, je ne comprends toujours pas pourquoi il m’a mis à la cave, après ce match perdu face à la Belgique. C’est le seul regret que je peux avoir.
Peut-on dire qu’on a fait de vous le bouc émissaire parfait, après cette défaite qui avait fait beaucoup parler ?
Pas le bouc émissaire, mais je me disais au fond de moi, pourquoi il ne me fait plus jouer… Toute l’équipe s’était ratée ce jour-là. C’était frustrant pour moi. Mais bon, le plus important c’était que l’équipe se qualifie au 2e tour et El Hamdoulilah, on a réussi à le faire.
Vous pouvez prendre votre revanche en qualifiant l’EN à la prochaine Coupe du monde en Russie…
Oui, voilà. J’aimerais bien réaliser ça et inch’Allah participer cette fois pleinement à cette Coupe du monde.
Quand l’Algérie pourra-t-elle remporter de nouveau la CAN, selon vous ?
Je pense que là, on a un peu plus d’expérience. On commence à comprendre un peu et à progresser de nos erreurs. Je crois que pour la CAN de 2017, on sera un concurrent très dangereux. Il faudra compter avec nous.
Est-ce que vous comprenez la réaction du public et des médias qui exigent de la sélection, en plus des victoires, du beau jeu ?
Avant, avec l’ancien coach, on ne développait pas du jeu non plus. Là, avec Gourcuff, on privilégie plus le beau jeu et on essaye d’être plus offensifs.
Après, ce sont deux coachs différents, avec deux cultures de jeu quasiment opposées. Et pour répondre à votre question, oui, je peux comprendre le public. Il aimerait qu’on gagne toujours par des scores lourds.
Ça vous a surpris les sifflets des supporters lors des deux matchs amicaux disputés en octobre dernier au stade du 5-Juillet ?
Pas surpris, mais c’était difficile. Mais bon, on en a l’habitude à présent. On doit savoir gérer tout ça.
Certains observateurs disent que Gourcuff a tué la concurrence au sein de la sélection. Etes-vous d’accord avec ça ?
C’est-à-dire ?
Le fait de faire jouer constamment quasiment un même groupe de joueurs (12 à 13), sans trop donner leur chance à d’autres éléments…
Franchement, je ne sais pas. Ce n’est pas à moi de juger. Ce que je peux dire en revanche, c’est que la sélection appartient à tout le monde et tout le monde a sa place.
Riyad, on vous remercie et encore félicitations pour ce trophée du Ballon d’Or. On vous laisse conclure cette interview…
Merci à vous. Je tiens vraiment à remercier Le Buteur et El Heddaf pour cette belle cérémonie. J’espère pouvoir revenir l’année prochaine et remporter à nouveau ce trophée. Je voudrais aussi remercier tous ceux qui ont voté pour moi et tous ceux qui m’aiment et me suivent chaque week-end avec mon club. Je dis merci à ma famille qui a toujours été là pour moi et je fais un coucou aux gens de mon village natal de Beni Snous, à Tlemcen.
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Riyad Mahrez
Vahid Halilhodzic.